Les locaux vous le diront, la crise n’a pas désempli les terrasses, et la douceur de vivre de la capitale grecque est bien vivace ! Cité jeune et chaleureuse, étrange mélange de Balkans et de Méditerranée, la ville s’est façonné son propre art de vivre, loin des idées reçues. Visite guidée.
l’occasion du festival Synch (prochaine édition les 4 et 5 juin 2010), nous nous sommes laissé guider par la charmante Olga Kouklaki, compositrice et chanteuse d’une électro mélodieuse et sensuelle. En pleine préparation de son deuxième album avec Marc Colin (producteur de Nouvelle Vague), elle nous emmène dans le coeur alternatif et artistique de sa ville.
Lieux de culture, lieux de vie
L’Institut français d’Athènes
Aujourd’hui encore, il n’est pas rare de se faire répondre en français par de vieux Athéniens dans la rue. L’IFA, avec ses 6 000 m2, est l’un des plus grands centres culturels français au monde. Siège de la multiséculaire amitié francogrecque, il est aussi un dynamique pôle de vie culturelle avec des temps forts, comme le festival du film francophone, au printemps, qui reçoit de grands acteurs et réalisateurs français. Olga Kouklaki, francophone, y a bien sûr des amis. L’IFA surplombe le quartier étudiant, et il fait bon venir se ressourcer à la terrasse de son café (multimédia), dans les heures chaudes de l’après-midi.
Vinyl Microstore, disquaire, radio, etc.
Vite, vite ! Ce petit épicentre culturel est menacé par la crise et annonce sa prochaine fermeture. Ouvert par le sympathique et très entreprenant Nectarios, en 2000, il a « ramené des labels indépendants en électro, reggae, pop, rock, musique expérimentale, des fanzines, quelques BD, et on a commencé à organiser des événements.» Ainsi Yuria, un festival annuel qui présente les meilleurs groupes grecs, ou des projections au sous-sol de la boutique. Il y a aussi, sur la mezzanine, une station de radio qui émet via internet. Des concerts gratuits avec participation aux frais libre, et chaque samedi, le “VM tour” : une virée de 24 heures à cinquante, avec des DJ’s, vers une destination proche d’Athènes. Bref, une vraie communauté, ouverte sur tout, et à tous !
Booze, bar et coopérative artistique
« Des jeunes, des gens et des choses à remarquer. Booze est un lieu mystérieux, avec quatre étages à explorer. Souvent, on y trouve des expos ou des performances de danse », raconte Olga. Grand, ouvert sur la rue, son rez-de-chaussée abrite un mélange baroque : une longue table en bois sur laquelle on peut jouer aux échecs et juste derrière, une platine où s’agitent de jeunes DJ’s, dans un esprit très rock, alternatif, new wave. Mezzanine, expos, écrans plasma, petits films, créations vidéo… Dans les gothiques escaliers, des oeuvres improbables et poétiques, faites de cloches, de lumière, d’images, d’objets récupérés. Aux étages, un bar, un espace de performance. La programmation, permanente, est branchée sur le réseau Artfactories (lieux culturels alternatifs du monde entier). Nikos Louvros, vieux loup athénien, et maître des lieux, veille au grain underground depuis la terrasse.
Bios, centre culturel et bar
« J’y ai vu Daddy G de Massive Attack en DJ set », raconte Olga. Un joli cube épuré tout en béton, au mobilier délicieusement seventies, avec sur le toit, une terrasse inoubliable. Un espace multiple, modulable, où l’on peut au choix déguster une boisson, écouter des DJ’s célèbres, venir voir des spectacles, performances, films (il y a même un petit cinéma), ou simplement humer ce qui se fait de plus pointu à Athènes. On y a vu Jamie Lidell, Wax Tailor, Laurent Garnier, Yoko Ono, de la drum’n’bass, du dubstep, et même de l’acid symphonique ! Bonus : de vieilles télés et des dictées magiques ornent les murs.
Bars et restaurants
Yantes, restaurant bio, et Riviera, cinéma en plein air
Dans le quartier étudiant, repaire historique de la gauche athénienne, les petites rues regorgent de terrasses et de tonnelles. Les Athéniens, comme Olga, ne penseront pas à vous en parler, et c’est pourtant l’un des meilleurs endroits, de jour, pour couler une après-midi de parfait farniente urbain. Yantes y est une oasis : cuisine de taverne, mais améliorée puisque la plupart des ingrédients, ainsi que les vins, sont bio, fournis par de petits producteurs. Les spécialités de Méthylène, de Crète, ou des montagnes y sont délicieuses. La cour et les vérandas s’égaient d’arbres centenaires, on est bien. Le tout en déboursant 25 ¤, par personne, au plus. Juste à côté, pour prolonger le plaisir en été, il faut aller voir un vieux film en plein air au cinéma Riviera (séances vers 21 h et 23 h). Plus charmant, tu meurs. Olga elle-même en convient ! Valtetsiou 44. Tél. : + 30 210 3301 369. Quartier Exarchia, métro Omonia.
Loop, bar électro
C’est là qu’Olga est née, musicalement, là qu’elle mixe régulièrement, grâce à Manolis, sorte de manitou électro qui encourage les surdoués de la scène locale, en les invitant à jouer ici. Il a vécu un peu partout en Europe, et il a voulu ouvrir ce lieu à Athènes pour en faire un classique du genre. C’est réussi. C’est un peu le spot des DJ’s, et l’ambiance n’est ni touristique, ni vraiment athénienne, mais 100 % électrique, y compris sur le petit dancefloor. On peut aussi déguster un cocktail en terrasse, l’été. Place Asomaton, 3. Quartier Thisio, métro Thisio.
Lazarou, taverne authentique en bord de mer
On vous donne l’adresse et le numéro, le reste, il vous faudra le mériter. Perdus au fin fond d’une petite crique, tout au bout d’Athènes, au bord de la mer Egée, se trouvent de merveilleux petits restaurants de poissons et fruits de mer, où l’on mange des délices grillés, frais, goûteux, en se laissant bercer par le bruit du ressac, et en sirotant, bien sûr, des pichets d’un léger résineux… Les prix défient toute concurrence, et ce sont surtout les Athéniens qui viennent là refaire le monde. Aghias Marina, 35°, avenue Athinon-Souniou. Tél. : +30 291 90 194 ou + 30 0291 91 521.
Tiki Bar (et resto)
Bar “exotique”, original, le seul sympa dans le quartier de l’Acropole. Pour un mojito ou un cocktail les jours d’été. On y trouve le sourire, et des concerts le dimanche soir. Falirou 15, Makrygianni, métro Acropolis.
Mode et tradition
YE (Yiorgos Elefteriades)
« En Grèce, c’est encore difficile de trouver des petits créateurs à prix accessibles, explique Olga. YE est sans doute le seul du genre, et encore, on pourrait facilement le classer “couture” ». YE, c’est Yiorgos, un designer de mode plein de grâce qui a ouvert un showroom intime dans le joli et fort branché quartier de Psirri. Il décrit le style de sa marque « entre la couture et le confort de tous les jours. On a été quelques-uns à penser “marché” il y a vingt ans. A l’époque, on ne faisait que du sur-mesure ou du prêt-à-porter, ici. » Il fait partie des initiateurs de la Fashion Week athénienne, assez récente, et sa marque est l’une des mieux perçues en Grèce.
Pantelis Melissinos, sandalier et poète
Le monde entier se bouscule dans cette adorable échoppe où officie Pantelis Mellissinos, issu d’une famille où l’on est sandalier de père en fils. Son grand-père avait une boutique de chaussures. Son père, qui voulait être metteur en scène, a dû la reprendre. Un jour, dans les années 50, on lui commande un jour des sandales grecques “à l’ancienne”, qu’il fabrique de mauvaise grâce. Mais les Américains de la base voisine se jettent dessus, et c’est la fortune, la ruée ! Jackie O. et Kate Moss firent faire les leurs. Depuis, son fils Pantelis, parti entre temps étudier l’art aux Etats-Unis, a repris le commerce, y accueille avec un sourire béat touristes et amis artistes, y travaille dur, y diffuse sa poésie, y invente des modèles customisés…. La gentillesse faite sandale.