Sept mois après le lancement de l’iPad, les tablettes – ces appareils mi-ordi, mi-téléphone portable – se sont immiscées dans nos vies. Et ce, largement grâce à Apple. Logiquement, aujourd’hui, la concurrence s’aligne, et elle s’annonce rude. Au point de rendre ces gadgets indispensables ? Voyons voir…
D’abord, quelques chiffres. Ayant vendu plusieurs millions d’iPad dans le monde depuis avril, Apple compterait actuellement pour 95 % des ventes de tablettes au total, contre 2 % seulement pour les appareils sous Android, la plateforme mobile de Google. Si les chiffres totaux restent marginaux par rapport aux ventes de smartphones – 80 millions d’unités, contre 5 millions pour les tablettes –, les analystes parient sur une croissance exponentielle. Pour les plus optimistes, plus de 200 millions de tablettes se vendront d’ici 2014 ; et même les plus pessimistes s’attendent à 50 millions d’ici quatre ans. Pourquoi ? Parce que l’iPad (disponible à partir de 500 ¤) a ouvert la voie à une nouvelle forme d’interaction avec la technologie, où le clavier devient superflu, puisque la priorité, c’est le divertissement ; où l’on peut se contenter de vérifier et de mettre à jour Facebook et Twitter, de lire les infos ou des magazines, de regarder des vidéos… et où l’on peut profiter d’une nouvelle génération d’applications qui rivalisent de créativité et d’ingéniosité. On pense notamment à Wired, le premier magazine à devenir véritablement interactif sur iPad ; à l’application de lecture d’histoires Toy Story, qui permet aux parents d’enregistrer leurs voix pour devenir les narrateurs d’un conte animé sur l’iPad ; à Epic Citadel, qui montre que les jeux vidéo en “vue première personne” sur tablette pourront bientôt rivaliser avec ceux des consoles ; et surtout à Flipboard, une “app” si géniale que tout possesseur d’iPad se doit de la posséder.
Son principe est simple : Flipboard prend vos flux Facebook et Twitter, puis affiche les mises à jour de statuts, ou les tweets, comme des articles mis en page dans un magazine en ligne. Ainsi, un article partagé sur Twitter sera extrait et présenté façon papier ; une belle citation sera affichée entre guillemets ; et une jolie photo sera agrandie et mise en avant comme il se doit. Avec, bien sûr, l’indication des commentaires ou retweets de chaque “update” ; tout cela avec, en prime, les coups de coeur, notamment photographiques, de l’équipe Flipboard. Grâce à cette seule application, j’ai partout avec moi un magazine personnalisé, qui se met à jour tout seul et qui sera toujours taillé sur mesure éditorialement parlant, puisque ses sources sont les personnes qui m’intéressent. Révolutionnaire. Rien d’étonnant, donc, à ce que de plus en plus de concurrents se pressent à la porte de ce marché potentiellement juteux. Le premier est le Streak de Dell (environ 500 ¤ hors abonnement). Davantage un gros smartphone qu’un rival de l’iPad – il s’agit de la seule tablette qui tient dans une (grosse) poche et qui permet de téléphoner –, il vise pourtant le podium de ce dernier. Son écran est tout de même nettement plus grand que celui de tout autre téléphone ; et contrairement à l’iPad, il dispose d’un appareil photo/caméra vidéo. Il s’avère également très rapide et facile d’utilisation, même s’il n’embarque pas encore la version la plus avancée d’Android. Le Streak est par ailleurs fort en multimédia, notamment au niveau son. En revanche, son écran, petit pour une tablette, ne donne pas envie de lire des heures durant. La Galaxy Tab de Samsung utilise également Android, mais sa taille est plus avantageuse. Son écran est d’un diamètre de sept pouces, donc plus grand que le Streak, mais plus petit que l’iPad, qui fait 10 pouces. Steve Jobs, le patron d’Apple, a attaqué directement cette catégorie rivale de façon étonnamment agressive, en affirmant que le format 7 pouces est « inutile, sauf si vous fournissez également du papier de verre pour permettre aux utilisateurs de réduire leurs doigts à un quart de leur taille normale. » Allez savoir… Lors de notre prise en main de la Galaxy Tab, on arrivait bien à appuyer sur les bonnes touches avec nos doigts normaux ; mais dans son ensemble, l’expérience est très loin de présenter la fluidité de ses concurrents. On se perd dans les menus, entre les icônes de l’écran d’accueil et la liste de toutes les applications ; il faut aller chercher les téléchargements dans un menu bien caché et les installer presque “à la main” ; et le choix de ces applications reste limité pour le moment. On apprécie en revanche le service de VOD (vidéo à la demande) incorporée et la présence d’emblée de jeux vidéo plutôt jolis, quoique peu originaux. On espère juste que d’autres partenaires s’ajouteront à Gameloft à l’avenir, histoire de varier l’offre. Mais notre principale réticence face au Galaxy Tab reste son prix : 700 euros hors pack opérateur mobile, soit 200 euros de plus qu’un iPad. Gloups… Egalement disponible ce mois-ci, la Ziio de Creative existe en formats sept et dix pouces, et ce à des prix nettement plus abordables que ceux de Samsung : entre 230 et 320 euros environ. Elle lit toute une ribambelle de formats vidéo – même le .mkv – et dispose notamment d’un port microSD. Bref, une tablette beaucoup plus versatile que celle d’Apple, mais on attend encore de voir ce qu’elle vaut en termes de qualité et de solidité, autres facteurs clés pour ces gadgets qu’on est après tout censé emmener partout… Enfin, les Français d’Archos ne sont pas en reste dans ce domaine, grâce à l’Archos 10.1 Internet Tablet. Dotée des mêmes proportions 16:9e que le Streak, cette tablette est presque aussi large qu’un iPad, ce qui renforce ses atouts de dalle de divertissement. D’autant que l’audio impeccable de la marque est toujours au rendez-vous. De plus, l’Archos est admirablement fine, ce qui favorise sa portabilité. On reste juste un peu sceptique face à la relative instabilité de la chose, tantôt lente, tantôt rapide dans l’exécution des tâches.
Il y a donc du choix en matière de tablettes déjà disponibles, mais ce n’est pas fini ! BlackBerry, l’autre mastodonte du smartphone, vient de jeter un pavé dans la mare en annonçant sa PlayBook. Cette dernière compte trancher avec l’approche Apple en devenant la première tablette pro – elle permettra notamment d’afficher des présentations et de synchroniser ses données avec son téléphone BlackBerry –, proposant tout ce que l’iPad n’offre pas. Comme l’indique Mike Lazaridis, codirecteur général de son fabricant, Research In Motion (RIM), la PlayBook propose « un vrai multitâche, une navigation web sans compromis et un multimédia hautes performances ». Autrement dit, plusieurs applications peuvent fonctionner en même temps et l’engin est compatible avec Flash, ce langage web qui permet d’afficher vidéos, jeux et tout autre contenu multimédia. C’est donc une attaque frontale contre Apple, tout en s’appuyant sur la force de RIM et son statut de fabricant préféré des cadres. A vérifier au printemps 2011, date à laquelle la PlayBook devrait être disponible en France (prix non communiqué pour l’instant). Mais n’oublions pas Google, qui n’a pas encore tiré sa première salve dans cette bataille : on s’attend à une tablette lancée avec l’opérateur mobile US Verizon, potentiellement cette année, mais les infos restent rares. Quant à HP, le plus grand fabricant de PC au monde, sa Slate 500 devrait sortir aux Etats-Unis cette année, mais cette dernière coûte très cher (800 dollars), tourne sous Windows 7 (elle n’est donc pas forcément optimisée pour la navigation tactile) et vise ouvertement le marché pro. Il sera probablement plus sage d’attendre la prochaine génération de tablettes de la marque, qui utilisera plutôt l’excellent système d’opération WebOS de Palm. A suivre début 2011…